Publié le Lundi 17 juillet 2023 à 17h00.

Tu vis ou tu meurs. Œuvres poétiques (1960-1969), d'Anne Sexton

Éditions Des femmes - Antoinette Fouque, traduction Sabine Huynh, 2022, 400 pages, 24 euros.

Tu vis ou tu meurs regroupe quatre recueils de poèmes d’Anne Sexton, enfin traduits en français. L’autrice est une figure importante de la poésie américaine du 20e siècle, récompensée par le Pulitzer en 1967, honorée aussi bien par les plus grandes universités américaines et la Royal Society of Literature britannique ; et pourtant, elle était plus que méconnue en France.

Résister à la brutalité du monde

Le premier recueil de l’ouvrage, Retour partiel de l’asile, raconte sa dépression suicidaire, l’aliénation de la condition de femme dans les années 1960 et la violence de l’instruction psychiatrique. Dans Tous mes chers petits, Anne Sexton évoque le deuil, la figure du père, la relation mère-fille, l’avortement. Dans Tu vis ou tu meurs, ce sont les tensions entre Éros et Thanatos qui s’expriment avant d’être dépassées par une injonction à vivre en résistant aux violences et brutalités du monde. Enfin, les Poèmes d’amour qui concluent l’ouvrage racontent la redécouverte, la réappropriation de son corps par la poétesse. Sans tabou, avec une langue puissante et une poésie orale et libérée des normes, l’autrice explore dans son œuvre la maladie mentale, les menstruations, l’enfermement psychiatrique, le désir…

Victime de la psychiatrie

Anne Sexton apparaît dans le monde littéraire à l’époque où l’on renvoie les femmes au foyer, où les psys, les médias, imposent un seul modèle à celles-ci, celle de la femme au foyer de la classe moyenne. Ce n’est pas un hasard si elle apparaît en même temps que des autrices comme Adrienne Rich. Comme ce n’est pas un hasard que, à l’image de son amie Sylvia Plath, Anne Sexton ait été une femme victime de la psychiatrie, une femme dont les désirs de liberté et d’indépendance entraient en conflit avec le conformisme d’une société patriarcale et chauvine. Une femme qui n’a pas su s’adapter ou se compromettre durablement. Comme Sylvia Plath, Anne Sexton mettra fin à ses jours en 1974. Cette traduction est l’occasion de ­découvrir enfin son œuvre poétique.