Publié le Mardi 10 juin 2014 à 08h00.

Bande dessinée : Panthers in the hole de Bruno et David Cénou

Éditions La boîte à bulles, 2014, 16 euros

BD conçue en partenariat avec Amnesty International, Panthers in the hole revient sur le parcours des « trois d’Angola » : Robert King, Herman Wallace et Albert Woodfox, co-détenus au pénitencier d’État de Louisiane. Arrêtés parce que noirs, maintenus en isolement sans raison judiciaire valable parce que membres des Black Panthers, l’administration carcérale s’est acharnée sur eux durant plusieurs décennies. Robert King, dont le témoignage a directement inspiré la BD, a été le premier libéré en février 2001, après 31 ans d’emprisonnement dont 29 à l’isolement dans des conditions effroyables. Herman Wallace est sorti de prison en octobre 2013 mais, condamné par un cancer, il succombera trois jours après sa libération... Albert Woodfox est, quant à lui, toujours incarcéré.

Militant sans relâche du fond de leurs cellules, ils n’ont cessé de se battre contre les pratiques inhumaines et humiliantes ayant cours dans les prisons (et ont remporté plusieurs victoires) mais ont aussi œuvré à la création d’une solidarité entre détenus, à contre-courant de la violence et du racisme qui y règnent en maîtres, sciemment entretenus par les gardiens. Très précise dans la reconstitution des faits, Panthers in the hole pourrait être une BD documentaire, en noir et blanc (bien sûr) mais avec des choix narratifs et picturaux fortement empreints d’une esthétique cinématographique. Guère surprenant, un dossier constitué par Amnesty International accompagne le tout, garantissant sans doute la légitimité de l’objet, qui n’en n’a pourtant pas besoin... Moins attendu, le dessinateur David Cénou est un ancien skinhead repenti, qui a d’ailleurs publié une BD sur cette part sombre de sa vie, sorte d’autobiographie romancée (Mirador, tête de mort, parue en 2013). De l’extrême droite la plus violente à une collaboration avec Amnesty International pour un projet solidaire de militants des Black Panthers, certains parcours sont décidément sinueux...

Sophie Coudray