Publié le Mercredi 8 mai 2024 à 15h00.

Aux Etats-Unis, la remise des diplômes ne couvre pas la voix des étudiantEs mobilisés pour la Palestine

Au milieu d’attaques violentes, les manifestations pro-palestiniennes se poursuivent et perturbent les cérémonies de remise des diplômes.

Lors de la cérémonie de remise des diplômes de l’université du Michigan, le 4 mai, par une belle journée de printemps, 62 000 personnes, amiEs et membres de la famille, se sont rassemblées pour assister à la remise des diplômes à 8 500 étudiantEs de premier cycle et 6 622 diplôméEs. Au début de la cérémonie, une cinquantaine de diplôméEs, portant des keffiehs et des drapeaux palestiniens, ont scandé : « Publiez, désinvestissez ! Nous ne nous arrêterons pas, nous ne nous reposerons pas. » 

De nombreuses remises de diplômes ne se dérouleront pas normalement cette année. À l’université de l’Indiana, certains étudiantEs ont quitté la cérémonie. L’université de Californie du Sud a déplacé sa cérémonie de remise des diplômes hors du campus, au Los Angeles Memorial Coliseum. D’autres manifestations de ­diplôméEs sont attendues ce mois-ci.

Le mouvement des campus s’étend

Au cours de la semaine écoulée, le mouvement de soutien à la Palestine s’est étendu à 43 campus universitaires dans 25 États. C’est la plus important mobilisation de ce type depuis des décennies. Ces manifestations, souvent initiées par des étudiantEs palestiniens, ont été soutenues par des juifs ­progressistes et bien d’autres. 

Sur la plupart des campus, les étudiantEs demandent à leurs universités de désinvestir les entreprises israéliennes, en particulier celles qui produisent du matériel militaire, de rompre les liens avec les institutions israéliennes et de soutenir un cessez-le-feu. Ils ont installé des campements appelant à la solidarité avec la Palestine et, dans l’ensemble, leurs manifestations ont été pacifiques, n’ont pas perturbé la routine du campus et n’ont pas menacé les autres étudiantEs. Bien qu’antisionistes, ces actions n’étaient pas antisémites, même si certaines interventions ont pu apparaître ambiguës voire relever d’un certain antisémitisme.

De nombreux administrateurs d’université, sous la pression des politiciens et de leurs donateurs, ont fait appel à la police, ce qui a conduit à quelque 2 300 arrestations dans tout le pays. À l’université de Columbia, où le mouvement a commencé, 112 personnes ont été arrêtées ; à l’université du Texas à Austin, 135 ; à l’université de l’État de New York à New Paltz, 130 ; à l’université Washington à St. Louis, Missouri, 100 ; et à Northeastern, Boston, 98. 

200 personnes arrêtées à UCLA

À l’université de Californie à Los Angeles (UCLA), où des contre-manifestants violents ont attaqué le camp pro-­palestinien, quelque 200 personnes ont été arrêtées. La mère d’un étudiant, qui s’était rendue à l’UCLA pour être avec son fils, a décrit la scène dans un courriel que nous avons reçu.

« La “contre-manifestation” était en fait un rassemblement commun de sionistes enragés et de suprémacistes blancs, au nombre de 2 000. Ensuite, pendant trois nuits, des bandes d’hommes sionistes et leurs alliés des Proud Boys (un groupe fasciste violent) ont attaqué les manifestants toute la nuit, avec de la musique à plein tube, des lumières éblouissantes, des crachats, des épithètes racistes et homophobes, des jets de morceaux de bois et de tuyaux métalliques, des jets de gaz et de bombes lacrymogènes. Les flics étaient là. Juste là. Et ils n’ont rien fait. Quelques dizaines de jeunes ont été hospitalisés. L’administration s’est servie de ces attaques comme d’une excuse pour évacuer le campement », a écrit la mère. « Je suis très fière de mes enfants et des dizaines de milliers de personnes qui ont manifesté et des 200 qui ont été arrêtées. Ce n’est pas fini. Palestine libre, libre ! »

Biden ne plie pas

Tous les administrateurs d’université n’ont pas fait appel à la police. Plusieurs d’entre eux ont déclaré que leur travail consistait à protéger la liberté d’expression et à maintenir un campus où elle pouvait avoir lieu. Ils ont négocié avec les étudiantEs, acceptant généralement que leurs revendications soient présentées au conseil d’administration de l’établissement, notamment à Vassar (New York), à l’université Brown (Rhode Island), à l’université Northwestern (Illinois), à l’Evergreen State College (Olympia, Washington), à l’université Rutgers (New Brunswick) (New Jersey) et à l’université du Minnesota (Minneapolis). 

Le président Biden s’est prononcé sur les manifestations. « D’abord, il y a le droit à la liberté d’expression et celui de se rassembler pacifiquement et de faire entendre sa voix. Ensuite, il y a le respect de la loi. Les deux doivent être respectés. » Mais Biden a aussi déclaré que les manifestations ne changeront pas sa position. 

Les étudiantEs affirment qu’ils qu’ils poursuivront leurs mobilisations. Mais après la remise des diplômes, les campus se videront. Si le mouvement doit se poursuivre, les étudiantEs, désormais hors du campus, auront besoin de ­nouvelles stratégies.

Traduction Henri Wilno