Publié le Jeudi 12 septembre 2013 à 15h30.

Infinie tristesse… Notre camarade Jacques Richaud est subitement décédé, hier, 10 septembre 2013

Communiste, il avait l'anti-impérialisme chevillé au cœur. Rien d'abstrait, une expérience vécue, dont il nous parlait encore début juillet, lors de notre réunion du comité du NPA du Lauragais. C'était en décembre 1972, quand jeune neuro-chirurgien, anti-militariste, mais non pacifiste, il avait demandé à être affecté comme coopérant sanitaire sur une théâtre d'opération de guerre, option qu'un jeune appelé sous les drapeaux pouvait réclamer à cette époque de conscription obligatoire pour les jeunes hommes. Ce fut l'hôpital de Phom Penh, chef du service de chirurgie, démuni de tout, où les ficelles de boucherie remplaçaient les fils de suture chirurgicaux manquants, où dépourvus d'anesthésiques, les chirurgiens amputaient les patients soulagés par les aiguilles d'acupuncture. Ce soir-là, décembre 1972, les visages de ses collègues cambodgiens devinrent livides à l'écoute de radio Pékin, leurs mains s'immobilisèrent sur un corps en charpie qu'ils opéraient. Jacques, lui, qui ne connaissait pas le cambodgien, a dû attendre la version anglaise de radio Pékin pour comprendre : les ondes venaient, sans commentaires, de diffuser la déclaration du chef d'état-major de l'armée impérialiste US, William Westrmoreland : il prévenait les peuples indochinois de la détermination des Etats-Unis à les faire plier au risque, disait-il, de « ramener l’Indochine à l'âge de pierre ». C'est un fait, les « Papiers du Pentagone » venaient de sortir de leur confidentialité, l'un des scénarios envisagés par les impérialistes US consistait à bombarder les digues millénaires de canalisation du Mékong et du fleuve Rouge pour noyer des millions d'Indochinois.

Anti-impérialiste de raison autant que de cœur, Jacques Richaud n'a jamais transigé. Contre toutes les guerres impérialistes, en Irak, en Afghanistan, au Rwanda, en Libye, au Mali, contre celle qui se prépare en Syrie… pour le droit au retour du peuple palestinien spolié par l'impérialisme et le sionisme, il opposait son communisme internationaliste. 

Compagnon de route de la LCR depuis la fin des années 1960, à Marseille, où il avait reçu l'enseignement de Lucien Sève, philosophe marxiste du PCF, avec la pensée duquel il a toujours entretenu des rapports de loyale confrontation, et fait ses études de médecine, puis à Toulouse, praticien hospitalier du CHU Purpan, partisan de la « roche communiste », selon l'expression de Daniel Bensaïd à l'époque, sur laquelle tous les courants communistes, voulait-il, se réunifient pour construire un parti commun, il discutait assidûment avec les marxistes du PCF ou anciens adhérents de ce parti, collaborateur actif d'Actuel Marx et incisif du Grand Soir (http://www.legrandsoir.info/_RICHAUD-Jacques_.html), il avait décidé de sauter le pas d'une adhésion formelle à un parti du mouvement ouvrier, au lendemain de la campagne électorale présidentielle de 2007, ayant tiré les leçons de l'impasse des candidatures « antilibérales » de Marie-Georges Buffet et de José Bové pour mener campagne pour celle d'Olivier Besancenot. Ce fut le NPA toulousain, se partageant entre son comité Santé (il était encore en activité au CHU, n'ayant pris sa retraite qu'il y a un an) et, résidant à Castanet-Tolosan, son comité du Lauragais.

Mais Jacques n'avait rien du petit soldat partidaire sectaire qui ne jure que par la « ligne » du parti auquel il adhère, héritage du communisme stalinien qu'il n'a cessé de condamner. Dans nos rangs, il n'a jamais renoncé à la critique. Mais toujours argumentée. Encore en juillet, par exemple, commentant le résultat électoral du FN à la partielle de Villenuve-sur-Lot, il nous surprit en défendant le point de vue que la montée du FN, « qui n'est pas un parti comme les autres, mais le pire ennemi de la classe ouvrière », doit être combattue par tous les moyens, l'action antifasciste bien sûr, mais aussi électorale, quitte à voter au deuxième tour pour n'importe quel candidat, de gauche comme de droite, pour lui faire barrage, nous redisant qu'en 2002, il avait voté Chirac « sans état d'âme » pour réduire au plus bas possible le score de Le Pen.

A ses filles et fils, à sa compagne, va toute notre solidarité fraternelle. Avec ses amis et camarades de tous les organismes de lutte auxquels Jacques collaborait, du comité de défense de l'hôpital public, aux comités de solidarité avec le peuple palestinien, dont il avait l'un de ses chevaux de bataille, nous partagerons leur peine lundi prochain, à 9 h 30, au crématorium de Cornebarieu, et nous nous engagerons à continuer son combat pour une société communiste débarrassée de la férule du capital et libérée de toutes les oppressions.

¡ Jacques Richaud, presente !

Ses camarades et amis du Lauragais