Publié le Vendredi 27 novembre 2015 à 21h55.

Embarras au PCF sur le vote de l’état d’urgence

Le Parlement a voté à la quasi unanimité la prolongation de trois mois de l’état d’urgence. Tous les députés du Front de gauche, tous au PCF sauf les deux d’Ensemble, ont donc voté avec le PS, la droite et le Front National une remise en cause des libertés fondamentales. Il n’y a eu que six votes contre (trois écologistes et trois PS). André Chassaigne, pour le PCF, a quand même expliqué « qu’il fallait un équilibre entre le maintien de la sécurité et le respect des libertés publiques ». Mais, comme le gouvernement avait accepté un contrôle parlementaire, plus de problème pour voter une loi dont le ministre de l’Intérieur reconnaissait plus tard à la télé qu’elle pourrait être encore prolongée…

Ce vote a occasionné un profond malaise dans les rangs du PCF, qui s’est même concrétisé par une motion hostile votée par la cellule à laquelle appartient Pierre Laurent ! Après le vote et les multiples interdictions de manifestations de rue, la direction de la CGT avec Philippe Martinez votaient une déclaration assez hostile à l’état d’urgence, alors que des UD comme celle du 76, du 75 ou celle de Toulouse appelaient même à manifester malgré les interdictions… Pour autant, la direction de la CGT acceptait d’annuler une série de mobilisations sociales en concentrant ses efforts sur la manif du 2 décembre à Bobigny.

Du coup, le vote au Sénat fut un peu différent puisque, sur 19 sénateurs Front de gauche, huit votaient pour l’état d’urgence, mais onze s’abstenaient dont Pierre Laurent, secrétaire national du PCF, et Eliane Assasi, présidente du groupe. Non représenté au Parlement, le PG faisait savoir qu’il aurait voté contre même si « il n’ y avait pas de différence de fond au Front de gauche sur l’appréciation de la situation », dixit son dirigeant  Eric Coquerel. Au même moment, Ensemble publiait un communiqué à peu près correct... mais sans parler du vote de ses deux députés et en fermant les yeux sur la présence de Mélenchon aux cotés de Marine Le Pen, Sarkozy ou Hollande lors de la cérémonie patriotique d’hommage aux victimes aux Invalides, le vendredi 27 novembre…  

Bref c’est la confusion totale et même si des Cgtistes protestent contre le « gauchisme » de leur dirigeant, comme en témoigne un reportage du Parisien, bon nombre de militants du PCF, ou simplement syndicalistes, sont scandalisés par ce vote des parlementaires qui ressemble pour les plus anciens au vote des « Pouvoirs spéciaux » au socialiste Guy Mollet en 1956, vote qui lui a permis d’intensifier la guerre en Algérie.

Dans l’Humanité, la critique est vive contre les conséquences de l’état d’urgence, mais là encore on sent la gêne, avec parfois des articles contradictoires mais aucun appel réel aux mobilisations. Et, d’ailleurs, mercredi 25 novembre, les députés du Front de gauche se sont abstenus sur le vote de la prolongation des bombardements en Syrie. Le PCF parle de paix, de refus de la guerre… mais ne s’y oppose pas à l’Assemblée nationale.

Raison de plus de s’adresser aux militantEs du PCF pour expliquer comment leur direction en arrive là, avec son souci de critiquer le PS mais surtout de ne pas rompre avec lui à la veille d’un deuxième tour électoral. Pour des électoralistes, c’est sacré !

Alain Krivine